mercredi 29 juin 2016

Le vendredi 13 mai j'ai voulu mourir.

[Trigger Warning suicide, hôpital (psychiatrique), enfermement.]


Les brancardiers sont arrivés, deux hommes grands, énormes, je me souviens les avoir à peine regardé quand ils sont arrivé tant j'en avais pas grand chose à faire. C'était la deuxième fois que je sortais de cette chambre d'hôpital depuis qu'on m'avait réanimé, j'essayais de retrouver l'automatisme un peu étrange de marcher, celui d'accorder ses mouvements et si j'avais fait mine d'être presque ok pour l'hôpital psychiatrique quand ma mère est arrivée pour venir m'apporter mes affaires, le brancard, les sacs, son regard, m'a fait réaliser où je partais vraiment. Je partais me faire interner. Maman m'a dit que ce n'était pas le cas, qu'on internait les fous à l'asile, mais à ce que je sache, j'étais folle et on me mettait moi aussi dans un asile. Je l'avais déjà supplié la veille de ne pas m'y placer, de me ramener à la maison et de juste me laisser me réadapter, mais elle avait refusé. J'ai pleuré pleuré fort. Mais là, devant le brancards, une fois les sacs embarqués, je me suis juste sentie prise au piège, encore plus qu'avant. Et je pensais que jamais de ma vie je n'allais me sentir aussi contrainte, mais j'avais tort. On m'a fait m'allonger sur le matelas entouré de métal et les hommes m'ont soulevés, j'ai pensé qu'ils étaient extrêmement forts mais cette pensée à vite été chassée par les larmes silencieuses de la peur qui me grattait le ventre. Je ne savais pas où j'allais, tout ce qu'on m'avait dit c'était que c'était un hôpital psychiatrique, en Picardie. Après j'ai su que c'était à Clermont, dans l'Oise. J'ai retrouvé mon téléphone, envoyé quelques sms, ma copine me manquait à n'en plus pouvoir, mon meilleur ami et ses mots rassurants étaient comme une part de moi à laquelle je n'avais plus accès. On m'a fait monter dans l'ambulance et commencé à rouler. Un homme, un des brancardiers à commencé à me raconter sa vie. Je n'avais pas envie d'écouter, je n'avais pas envie qu'il me parle. Je n'avais pas besoin de connaître sa vie à lui alors que tant d'autres m’inquiétaient déjà et que je venais de retrouver la mienne. Il me disait de lui dire s'il me gênait, lui dire si je le gêne. Non, personne ne dit ça. Personne ne dit à son ambulancier quand ille sort d'un service de réanimation en vue d'aller dans un HP « ta gueule mec, j'en ai rien à faire ». J'ai posé quelques questions, fais mine d'écouter. J'avais mal au crâne, le trajet n'en finissait pas. Il me parlait de reprendre les études que j'avais définitivement arrêté depuis novembre suite à une phobie scolaire sévère.

« Pourquoi tu fais plus d'études ? »
« Parce que je suis malade »
« Bah j'ai été obèse j'ai quand même fait des études. »
« C'est bien pour vous. »

J'ai tourné la tête de l'autre côté, fermée autant qu'on le peut quand on est dans un brancard à côté d'un homme chauve de 55 ans qui s'ennuie. La discussion s'est diminuée jusqu'à ce qu'on finisse par arriver. On m'a fait patienter plusieurs heures seule dans un accueil, un infirmier a fini par me parler et noter en un quart d'heure quelques informations sur moi dans un bureau. C'était un homme agréable, mais je sentais que c'était parce que j'étais une jeune fille blonde et blanche qu'il était aussi gentil, il l'a dit plusieurs fois après "vous n'avez pas votre place ici". Deux heures après on m'a fait rencontrer une psychiatre accompagnée de l'infirmier à qui j'avais précédemment parlé. Elle était rude, sévère, je me sentais agressée et non libre, je balançais mes pensées comme je pouvais « oui j'ai été dans plusieurs relations abusives, oui je me suis faite violée, oui je connais pas mon père, oui j'ai coupé contact avec le reste de ma famille, oui oui oui tout ça tout ça oui j'ai déjà essayé de mourir il y a quelques mois oui oui ».

L'infirmier m'a gentiment donné quelques cigarettes, j'ai pu sortir les fumer dehors, on m'a fait voir un médecin, histoire de contrôler si tout allait bien encore. L'infirmier m'a autorisé à prendre une douche dans une des cellules d'enfermement. Quand il a ouvert la porte de la cellule j'ai sentie la peur se mettre à gratter de plus belle dans mon ventre quand elle c'était adoucie avec ces heures d'attentes. Dans la pièce, un lit en fer visé au sol, des attaches en cuir pour les poignets  et les pieds. Rien d'autre dans cette pièce. Juste à côté une petite salle de bain avec un lavabo des toilettes et une douche au plafond. L'eau était froide et a vite inondé la salle de bain. J'avais froid et je me concentrait sur cette douleur physique plutôt que sur le reste. C'est en retirant mes vêtements que j'ai vu les marques bleues, violettes, vertes, oranges et rouges sur mes bras. D'énormes bleus faits par les perfusions. Et ce n'était que le début de leur camaïeu.  

Je continuerai bientôt. 
Louve. 

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